Pas une semaine sans un évènement majeur, un sondage, voire un fait divers qui ne bouleversent, interrogent et surtout inquiètent quant au devenir de chacun et celui de l’humanité.
Les commentaires médiatiques ne manquent pas; les réseaux dits sociaux diffusent sans cesse les avis de politiciens, journalistes, experts en terrorisme et autres citoyens. Tous brossent des portraits d’une société où tout change et où tout se dérègle. Les psychanalystes quant à eux, ne semblent plus guère être des invités désirés!
Longtemps les théories psychanalytiques ont été utilisées comme grilles de lectures du psychisme de l’individu et de son environnement familial ou socioculturel. Mais aujourd’hui le monde se soucie peu de lui laisser une place et d’entendre son discours. Les livres abondent tantôt pour critiquer une figure tutélaire, tantôt pour noircir une pratique qui serait inefficace et obsolète. Alors OEdipe est-il définitivement mort et enterré? Et quelle pertinence a encore la psychanalyse pour nous aider à nous orienter dans notre vie et à comprendre l’actualité de notre monde?
Freud s’est intéressé aux influences socioculturelles de son époque sur les symptômes de ses patients. Actuellement, notre pratique nous confronte à d’autres patients qui souffrent autrement, d’autres symptômes, et qui demandent d’autres choses. L’exercice de la psychanalyse se heurte à de sérieuses résistances individuelles, mais aussi institutionnelles et légales.
Et pourtant, les apports théoriques et pratiques de la psychanalyse nous offrent des clés pour mieux comprendre et agir, et nous permet d’avoir une vue plus éclairée et plus lucide sur soi, sur les autres et sur la vie.
Dans les nombreux problèmes et manifestations de violences et de souffrances auxquels nous sommes tous confrontés, il y a un dénominateur commun; nous pouvons le découvrir chez les patients dits narcissiques et états-limites de plus en plus nombreux dans les consultations, dans les conflits tant de voisinage qu’interethniques, dans les élections et intentions de vote, dans les crises que traversent les couples, les groupes, les nations. Et la psychanalyse en est, à mon sens, l’antidote naturel.
Il y a dans les valeurs et les fondements de la psychanalyse de quoi valablement enrichir la gamme des remèdes aux maux contemporains. Mais quelle psychanalyse? Lorsque les critiques fusent, il faut les écouter, et résolument nous atteler à la faire évoluer tout en revenant à ses racines. Il est possible de s’inspirer d’autres modalités thérapeutiques, de s’intéresser à comment elle évolue dans d’autres pays, de changer le cadre traditionnel, d’intégrer de nouveaux outils, de favoriser les échanges entre les divers courants analytiques et de se débarrasser des reliques et des chapelles!
Il faut une psychanalyse moderne qui redevienne attractive autant pour les étudiants qui en assureront l’avenir, que pour les patients confrontés avec anxiété aux exigences et défis du monde actuel.
Commençons ensemble à en discuter, et voyons ce que la psychanalyse nous apporte d’essentiel pour vivre, travailler et aimer. »
ARTOCLE DE CHARLES SASSE
Président honoraire de l’Association de Belge de Psychothérapie
Vice-président de la Confédération Européenne des Psychothérapies Psychanalytiques